Nathalie Gassel est à la fois adepte du body-building, championne de boxe thaïlandaise et poète. Poète des plus rares, faut-il ajouter, en se souvenant seulement qu’au seuil du XXIe siècle la poésie – plus exactement l’alliance poétique de certains mots, de certaines images – n’est pas forcément celle d’hier.
La prose de Nathalie Gassel est charnelle dans les deux sens du terme. Elle parle des corps, et elle a, elle-même, la provocation, l’attirance, la nudité du corps.
Rarement, il me semble – alors que prolifèrent les textes « érotiques » qui ne sont rien d’autre que de vieux textes à l’eau de rose que l’on a cru remettre, par le vocabulaire, à ce que l’on croit être la mode du jour – un écrivain a-t-il tenté, avec une telle sincérité et un tel mépris des convenances, d’exprimer les réalités actuelles de l’amour.
Nathalie Gassel a donné à ces pages ce beau titre Éros androgyne, car elle se sent, je crois, elle-même androgyne. Elle a, dans son approche physique d’abord, puis dans son approche littéraire du corps d’autrui – fût-il corps d’homme ou de femme, lui aussi – l’étonnante aptitude à pouvoir désirer, et parfois dominer, ce corps des deux manières qui semblent d’ordinaire si irrémédiablement opposées, manière virile, manière féminine, confondues.
On n’est donc pas ici, on l’aura deviné, dans un texte de tout repos. On ressent, au contraire, l’impression de quelque chose d’inlassable, d’« incomblable » si j’ose dire, à lire ces pages, parfois réservées, parfois de folie, où la hantise de l’autre se donne, pour une fois, pour ce qu’elle est : impossible à assouvir, même, ou surtout, quand il semble que l’audacieuse amoureuse soit parvenue à ses fins.
— Éric Brogniet, extrait de la préface