Dans nos sociétés productivistes et fonctionnelles, la nature joue les utilités. Elle est pourtant à l’essentiel, le vivant nous prêtant à vivre jusqu’à l’air que nous respirons. De même, le rêve est le substrat de notre esprit ; il en est la sève sous-jacente qui nourrit notre présence au monde et la facilite. Il en répare l’étrangeté. Lorsque l’espace et le temps semblent rétrécir (plus vite parcourues les distances, plus construit le paysage, plus morcelé), ce ne peut être qu’au travers du regard qui s’y inscrit que s’ouvre le paysage à l’infini d’un rêve. Jean-Michel Aubevert, de solstice d’hiver en solstice d’été, visite et revisite des paysages familiers, ceux où il aime à se retrouver et où son imagination se déploie, ceux où « l’air ne lui est pas compté ». Il ne s’est pas contenté de recueillir le décor changeant de la nature. Ainsi que le conseilla le peintre Gauguin, il a rêvé devant (« Ne copiez pas la nature, mais rêvez devant elle »).
Jean-Michel Aubevert (1952-2024) a vécu entre le Brabant Wallon et la Bretagne. Il est l’auteur de vingt-trois ouvrages, poésie en prose, vers libres et récits. Il a en outre préfacé de nombreux recueils et collaboré à plusieurs ouvrages collectifs : Cahier Chronique n° 2 et Venise (L’Âne qui butine), le Mur (anthologie, Estuaires), Résonances (anthologie, Mémor), Photomancies (Le Coudrier), Piqués des vers (anthologie, Espace Nord), À quels feux s’invitent vos rêves (Le Coudrier). Il a aussi participé sur scène au récital les Utilités du rêve, soutenu par Le Coudrier. Un numéro hors série de la Nouvelle Revue moderne lui a été entièrement consacré.