Recueil après recueil, explorateur du quotidien, Roland Tixier dresse l’inventaire des choses vues, des petits faits, des émotions intimes saisies sur le vif. Pas à pas, il garde trace, histoire de défier la fuite inexorable du temps. En exergue, deux vers du poète bouddhiste Pang Yun donnent la clef d’une exigence aux antipodes des vanités de salon : « Jour après jour je ne fais rien de rare ; / Mais je m’y tiens tout naturellement. » La démarche rappelle aussi celle de Pérec dont, sans le nommer, Roland Tixier reprend (dans le désordre) une formule révélatrice d’un hasard objectif ou d’une empathie posthume : « trier classer ranger / n’être pas si possible / son propre encombrant. » Comme le note justement Christian Degoutte, dans la préface, Avec le temps, suite de haïku, « dessine un seul poème. » La rue est le pré carré du poète, sans borne ni passage interdit : « Ce qui retient dans ce livre, c’est le pas, c’est comme on trace son chemin… » Cette écriture d’instantanés rappelle parfois ce qu’Yves Martin dit de la poésie telle qu’il la conçoit : des « copeaux » ! Roland Tixier lui aussi rabote à l’extrême, dépouille, jusqu’à la mise à nu du sens, ou bien selon Christian Degoutte, ne se payant pas de mots, il fabrique : « de la petite monnaie de poésie. »
Roland Tixier est né en 1946 à Lyon. Fidèle piéton des rues de Villeurbanne et de Vaulx-en-Velin qu’il affectionne tout particulièrement. Poète urbain à l’écriture dépouillée, il est aussi animateur d’ateliers de création poétique en milieu scolaire. Il fut durant seize années éditeur à l’enseigne du Pré de l’âge.