elle a mille ans
née d’une lande marécageuse
dont le sol de limon et de sable n’offre guère de carrières de pierre de construction
la tradition est de démolir d’anciens immeubles pour en construire de nouveaux
à partir des années mille neuf cent cinquante les promoteurs
immobiliers ont fouillé Bruxelles dans les moindres replis de ses entrailles
pour construire des parkings souterrains ou en étages
des lignes de métro des bâtiments de bureau l’interminable jonction
ferroviaire Nord-Midi des tours des hôtels de luxe
en-dessous on trouve encore des dents de requin des poissons
des coquillages et des huîtres incrustés dans le sol de la couche tertiaire
du quaternaire il reste un omoplate de mammouth
le tibia et un morceau du crâne d’un rhinocéros laineux
des cornes de boeuf et de grand cerf.
dans le ventre du Marché-au-poisson traînent les reliefs d’un
repas moyenâgeux des cornes de chèvre…
Serge Noël est né en 1956, l’année du Bois du Cazier et du vingtième Congrès de Moscou. Depuis quarante ans, il travaille comme éducateur et animateur dans les quartiers populaires de Bruxelles.
À l’âge de quatorze ans, il a découvert le maoïsme et le surréalisme, et il n’a cessé de militer dans les milieux de gauche radicale, contre le racisme, contre la guerre, contre les injustices sociales et pour le féminisme. Aujourd’hui, il anime des ateliers d ’écriture, des cours d’alphabétisation pour le compte d’une asbl qu’il a contribué à créer il y a vingt ans. Son écriture s’est nourrie de surréalisme mais aussi de constats sociaux et d’aspirations amoureuses.