
Une jeune femme reçoit en héritage les enseignements de sa grand-mère préférée, Nina, décédée.
Résistante juive et prisonnière politique durant la seconde guerre mondiale, Nina s’était donné pour mission de libérer le monde des monstres. Trouver la force pour continuer à aimer, vivre et résister.
Entre documentaire et fiction, Cheveux rouges est un millefeuille aux couleurs de la transmission, du devoir de mémoire et de l’amour comme acte de libération de la vie.
Ce texte a été présenté au Théâtre des Doms, en Avignon, lors de la soirée Pecha Kucha organisée par la SACD-SACM, le 13 juillet 2013.
Le spectacle qui en découle a été créé au Théâtre National de Belgique dans le cadre du Festival Noël au Théâtre en décembre 2013. Il a été présenté aux Rencontres de Huy en 2014.
Le texte a été adapté et mis en scène par Didier de Neck. Caroline Bouchoms (la narratrice) était accompagnée par Joëlle Strauss (la violoniste) et par Cécile Balate (la régisseuse).
Extrait
J’habite dans une roulotte. Quatre roues, une structure métallique, quelques planches, de la terre, de la paille, une fenêtre qui ne ferme pas très bien, trois marches d’escalier, une porte qui grince, pas de verrou. C’est mon nid. J’y travaille.
À l’entrée de la roulotte, juste derrière la porte, il y a mon atelier. Un jour où la musique de mon cœur était un peu grise, j’ai pris une plaque de cuivre, une tenaille, un marteau, j’ai fabriqué mon oiseau préféré, le Phénix. Avec un couteau, j’ai dessiné son œil, son bec. Avec la pointe du couteau, j’ai tracé l’implantation de ses cheveux de cuivre… de ses plumes rouges.
Un soir d’été, le Phénix brillait au soleil couchant. J’étais assise sur le pas de la porte. Dehors, il faisait très doux, le ciel était orange. Mon carnet violet sur les genoux, ouvert sur une page blanche – le blanc, ça me calme – je me suis mise à écrire.
« J’ai une amie magnifique. Quand je pense à elle, mon cœur frissonne, j’ai les larmes aux yeux. Je ne sais jamais si c’est de la joie ou de la tristesse. On s’est rencontrée le jour de mon anniversaire. Il y a dix ans. Je ne me sentais pas très bien. Madame, je reviens d’Afrique, du Rwanda, vous savez, là où c’était la mort partout… J’ai vu des choses… Elle m’a prise dans ses bras. Pleure mon poussin ! – Mais … madame … Je n’arrive plus à pleurer ! – Ne t’inquiète pas, tout va s’arranger. Tout s’arrange toujours, tu sais ! »
J’ai écrit, c’est ma grand-mère préférée. Elle est trois fois plus vieille que moi, je suis deux fois plus grande qu’elle… Un grand poussin dans les bras d’une petite chouette ! J’ai pas écrit ça, j’ai écrit, c’est vrai qu’elle est très petite, un mètre quarante-huit, mais quand elle déploie ses ailes, elle devient comme un immense oiseau qui vous protège.