• Sous-titre:
  • Auteur(s): Jonas Ekhr
  • Éditeur: L'Arbre à paroles / P.O.M. Poésie ouverte sur le monde
  • Genre: Récit
  • Péritexte:
  • Format: 13 x 20 cm
  • Nombre de pages: 50 pages
  • ISBN: 978-2-87406-464-7
  • Parution: 2011
  • Prix: 6.50 €
  • Disponibilité: Disponible
  • Distribution: Maison de la poésie d’Amay (Belgique et Luxembourg). Librairie Wallonie-Bruxelles (France).

Dans une prose poétique identifiable dès les premiers mots mais qui ne se laisse pas appréhender aisément car elle exige une attentive, une active, complicité du lecteur, Jonas Ekhr n’en finit pas de creuser son Trou. De recueil en recueil, un trou qu’il élargit, installe dans le langage et le justifie par le déploiement du texte, le mouvement de la phrase qui est autant travail de sape qu’entreprise de déblaiement. Dans Dévoile, Jonas prolonge André Breton lorsqu’il conseille « Dis ce qui est en dessous ». Pourtant rien de surréaliste ici, simplement la tentation ou la tentative d’aller voir en dessous du texte, de la phrase, du sens. Jusqu’à une apparente sérénité : « Au hasard, disais-tu, voire… À force d’arpenter le temps tu arriveras fatalement, vitesse décroissant, à un point de repos – équilibre, dit-on, d’ordre dissipatif. Et, sinon à un point, disons dans quelque voisinage, où tu demeureras quasiment immobile, indéfiniment. » Nous ne sommes pas loin de la métaphysique…

Francis CHENOT

Extrait

Dévoile un je qui n’a de cesse qu’il ne naisse. Naisse non pas ici ou là, nu au hasard, aventureux, sans lien aucun avec le jeu de toute aînesse, mais dans ce lieu, ce nid, ce trou, qui en toi nie ce qui se noue et de la vie déjoue l’ivresse. Dévoile un je qui n’a de hâte qu’il ne happe au gré des vents tout ce qu’il hante de sa voix. Tout ce qu’il presse de sa langue en lui repue. Tout ce qu’il hante de l’oubli tant il lui manque. Tant se dérobe sous son pas ce lieu qui tangue sans milieu. Ce lieu qu’il ronge à s’égarer sans appétit. Ce lieu qu’il dresse à s’épuiser le temps qu’il tue à y puiser de quoi passer. Ce lieu sa gangue de passage. Ce lieu passager d’utopie. Ce lieu confît de cécité. Ce lieu sans nom. Ce lieu non dit. Ce lieu message et messager de tout mensonge. Ce lieu d’un songe qu’il ne fait que dans la rage. Ce lieu dont il – ce je divis – détruit le corps mais non l’idée. Et d’où chaque heure ou chaque nuit, dans un sommeil dont il ne suit sans s’apeurer tous les transports, il tente en vain de s’arracher, de se soustraire et retrancher, comme d’un tout ou d’une somme on ôte un lien surnuméraire, afin d’enfin prendre son vol, affirmer son essor, développer son poids dans la nue qu’il médite au plus loin de lui-même, écho coupé de sa redite…