• Sous-titre:
  • Auteur(s): Serge Peker
  • Éditeur: M.E.O.
  • Genre: Roman
  • Péritexte:
  • Format: 14.5 x 21 cm
  • Nombre de pages: 120 pages
  • ISBN: 978-2-930333-59-5
  • Parution: 2012
  • Prix: 14 €
  • Disponibilité: Disponible
  • Distribution: Pollen

Un couple, Félix et Felka. Tous deux peintres. Felka, avant de mourir dans la Grande Nuit du camp, revit les principaux moments de sa vie de couple jusqu’à sa déportation avec son mari en juillet 1944. Les tableaux de Félix animent les souvenirs de Felka et lui permettent de transformer ses ultimes moments en un véritable souffle de vie et de liberté. « Si les nazis osaient lever les yeux vers nous, ils nous verraient nous étreindre dans le lit de notre indifférence à leurs sombres uniformes. Mais ils n’oseront jamais car ce serait admettre que nous sommes les vainqueurs et qu’ils sont les vaincus. »
Ce couple pourrait être celui de Felka Platek, peintre juive d’origine polonaise et de Félix Nussbaum, peintre juif allemand, tous deux arrêtés à Bruxelles le 20 juin 1944 et déportés à Auschwitz le 31 juillet.
Le récit se construit à partir, et se nourrit des tableaux peints par Félix Nussbaum, aujourd’hui conservés dans le musée érigé en son honneur dans sa ville natale d’Osnabrück. De Felka Platek, il ne reste qu’une huile et quelques gouaches, le reste de l’œuvre ayant été détruit par les nazis (en même temps que la moitié de l’œuvre de Felix Nussbaum).
Jusqu’au 17 février 2013, le musée d’Art moderne de la Ville de Paris organise l’exposition « L’Art en guerre, France 1938-1947 », où seront exposés plusieurs des tableaux de Felix Nussbaum qui ont inspiré ce roman.

Extrait
La mort est en mon corps. Je le sais par mes membres qui ne me répondent plus. Je le sais par mes yeux, ma bouche, mes oreilles qui ne veulent rien voir, rien dire, rien entendre de cette mort qui m’entoure dans la Grande Nuit du camp. Mais peut-être vaut-il mieux remercier mes organes de ne plus rien vouloir de ce que voulait mon corps lorsqu’il se voulait femme ?
Voir ! Ce que verraient mes yeux ne serait pas une femme, mais des membres dispersés autrefois assemblés dans ce qui fut un corps.
Dire ! Ce que dirait ma bouche serait incompréhensible.
Entendre ! Ce qu’entendraient mes oreilles serait le bruit de l’innommé.
Une femme ! Une autre que moi-même aura été une femme, mais cette mort en mon corps lui est une étrangère. Une autre que moi-même qui ne suis rien désormais qu’une diaspora de pieds, de jambes, de bras, de mains.
Un souffle, c’est tout ce qu’il me reste ! Rien qu’un souffle de vie tapi dans des débris et puis tous ces bruits d’ombres qui respirent en mon souffle comme si le monde entier était dans mes poumons.

Il fait nuit dans le camp. Je le sais par ces ombres. C’est là ma dernière nuit, je le sais par ma fièvre dont la chaleur enflamme mon léger souffle de vie tout en le consumant dans une ultime flambée. Cette nuit, ma dernière, il faut que je la sauve de la Grande Nuit du camp.

Oui ! Dire oui, Félix ! S’écarter de la mort par un oui ! Dire oui à mon souffle de vie dont toi-même fais partie, car sans toi, mon amour, je ne pourrais rien dire et ne pourrais que pourrir dans cette mort en mon corps.