Ecrire d’un livre de poèmes, c’est tenter d’en faire le portrait. Car tout vrai poète – et Willem M. Roggeman est de ceux-là – délègue dans l’aura de ses mots une image qui, ainsi que la lumière sur l’étang, se génère autant du récepteur que de l’émetteur. Hôtel Mélancolie me donne une plage déserte semée de coquilles vides, de ces coquillages qu’en des temps très anciens l’homme glissait dans les parois de sa caverne, première bibliothèque. Et qu’est-ce qu’écrire un poème sinon de tenter de lire le monde, celui qui nous est proposé, celui qui nous est à jamais refusé. «Le poète s’abuse sur le nombre de lettres du mot Dieu», écrit Roggeman. C’est dire que l’approche poétique est celle de l’absolu et que la faiblesse du langage même la rend improbable. Ce langage, Roggeman ne cesse de l’observer, de l’interroger, de lui découvrir de fatales approximations, des faux pas, des fuites, et par ailleurs d’éprouver une allègre exaltation à jouer avec les mots ; jeu magique, jeu dérisoire, mais le grand jeu, semble dire le poète, sans le dire, comme on considère nostalgique en soi ses tentatives et son perpétuel repentir.
Willem M. Roggeman est né à Bruxelles. études en sciences économiques à l’université de Gand. Journaliste au quotidien Het Laatste Nieuws, où il fut critique de littérature et des arts plastiques. Il dirigea le centre culturel flamand «De Brakke Grond» à Amsterdam.
Son oeuvre contient plus de cinquante titres en langue néerlandaise, dont la plupart sont des recueils de poésie, mais aussi des essais, des biographies, des pièces de théâtre, des recueils d’interviews, des traductions et des études sur des peintres flamands et hollandais.