Les textes réunis dans cet ouvrage ont été rédigés entre 1962 et 1999 soit sur demande, soit spontanément. Mais dans l’un et l’autre cas, ils s’inscrivent dans le fil d’une même recherche, poursuivie sur deux plans parallèles. Il s’agit de la spécificité de l’art des anciens Pays-bas méridionaux, telle qu’elle peut être saisie dans son développement historique, en rejetant d’une part l’idée de constante historique nationale à fondement ethnique, d’autre part celle d’un déterminisme du milieu à la façon de Taine. Un tel programme impliquait évidemment une idée de l’art et de son historicité. D’où une enquête méthodologique parallèle qui conduit à l’interrogation des principaux maîtres de la Kunstwissenschaft germanique et de la pensée esthétique et critique italienne.
A l’assimilation de ces courants fondateurs de l’approche moderne de l’art s’ajoute la circonstance que les considérations sur l’art des anciens Pays-Bas ont été mûries et développées soit pendant, soit après un séjour de vingt ans en Italie, précisément à Rome, et donc à partir d’une familiarité quotidiennement cultivée avec l’art italien, et en particulier l’architecture et le problème de la perspective. Dans cette mesure, l’art des anciens Pays-Bas et de la Belgique du XIXe siècle est vu bien moins à partir d’une tradition de pensée nationale, que plutôt du dehors, ce qui entraînait naturellement un changement radical de point de vue. A la recherche traditionnelle des sources et influences italiennes s’est subrepticement substituée celle de la spécificité des modes de réception et d’interprétation de celles-ci, dans un échange dialectique à échelle européenne où chaque culture trouve son accent propre, qu’elle développe à travers les vicissitudes de sa situation historique, dans un jeu continu de réceptions et de dons, c’est-à-dire de sélection orientée, de création et de rayonnement.