Une pièce de théâtre de Kenan Görgün adaptée de ses livres Anatolia Rhapsody et Rebellion Park (Vents d’Ailleurs, 2014) et J’habite un pays-fantôme (Couleur livres, 2014).
Deux frères. L’un, Kenan, auteur qui se cherche, s’invente, se pense libre, écrivain provocateur, homme du mouvement. L’autre, Othmane, plus traditionaliste, respecte la figure tutélaire du Père. Il est religieux, va se marier, il ne sait du monde que les évidences transmises. Ils sont confrontés à ces deux visions et expériences du monde dans un huis clos qui va les tendre l’un vers l’autre, l’un contre l’autre.
Mais le vide en eux, un certain vide, peut-être l’amour, la certitude, la reconnaissance les pousse à partir vers le pays des pères, la patrie. Et cette patrie devient vite un « pays fantôme ».
Celui fantasmé par le Père et qui s’est lové dans sa mémoire minérale, celui des mères qui élèvent leur fils dans des contradictions de chaque jour, celui des jeunes qui retrouvent un pays qui a été rêvé et qui s’est transformé à leur insu.
Ils partent, comme des « réfugiés de l’intérieur » et sont confrontés à la Turquie d’aujourd’hui. Cette Turquie, c’est partout, nulle part, ici, là-bas.
Kenan Görgün se définit comme un étranger de partout. Citoyen d’Occident ayant ses racines dans un petit village anatolien, il faut chercher après lui dans ses écrits : romans, nouvelles, pièces de théâtre, scripts pour le cinéma, chansons pour groupes de rock,
journalisme gonzo dans les coulisses de la culture. Avec ce roman séminal, il pousse encore plus loin le brouillage des frontières et des identités et cosigne une œuvre littéraire avec « Yadel », un auteur qui existe et n’existe pas, qui est Kenan et surtout son alter ego, empruntant à partir d’ici les chemins de traverse de sa propre aventure romanesque, avec des textes qui seront (et ne seront pas) l’œuvre de Kenan Görgün.