Véronique Daine nous fait comprendre que « le style est une cicatrice mal fermée » (François Jacqmin). Il y a chez elle la volonté de laisser faire, de rester dans l’ignorance pour préserver ce qui vient. Le paradoxe – dire sans rien dire – est présent à même la phrase et se manifeste dans la syntaxe. J’aime ce phrasé fait d’emmêlements et d’avancées à rebours, cette poésie de l’errance. C’est le surgissement, qui la fait écrire. À l’évidence, écrire comme cela, c’est désirer s’approcher avec précaution de ce qui est à la racine. Ainsi, cette poésie de l’aube, de l’aube qui vient, cette attente, cette expérience de la lumière et de la nuit, me rappellent ce que dit le peintre Zoran Music du passage d’un extérieur extrêmement lumineux à un intérieur très sombre (émotion qui est à l’origine d’une série de tableaux sur les intérieurs de cathédrales) : « Je m’asseyais dans le noir en attendant de voir peu à peu des lumières douces. C’est très beau de trouver la lumière dans le noir ».
Françoise Le Bouar
Extrait
il pourait être facile de se laisser aimer des choses
mais nos savoirs
que sait-on de nos savoirs
sont-ils ceux de ce qui ne cesse de prendre corps
au cœur d’inconcevables victoires sur la division
ou sont-ils ceux d’une autre métaphore
plus troubles et plus sombres ceux-là
et comme d’une effroyable eucharistie