Francesco Pittau, infatigable cuistot d’une poésie al dente, sortie de la marmite de Dagda (chaudron de jouvence des Celtes anciens) avec cette fermeté, toutefois souple, qui n’attend qu’un filet d’huile, une gousse d’ail et une graine de piment de Cayenne pour vous mettre en appétit de lecture. Un régal, ou mieux encore un regalo, pour faire allégeance aux mannes de notre Sarde d’Outre-Sambre-et-Meuse. Un cadeau, donc, puisque tel est le sens de regalo en italien.
Pas étonnant puisque ce Gallo-Siculo-Sicane a nourri sa verve lectrice de la saveur naturelle et cependant subtile qui se dégage des merveilles inépuisables enchâssées dans le corps des textes sans chichi ni envolées lyriques d’un Reverdy, d’un Follain et d’un Godeau, géniaux poètes dédaigneux vis-à-vis de toutes les modes de passage.
Dans la gueule d’atmosphère de cette poésie-pour-tous (à l’exception de ceux qui ne savent la déguster que coupée de tranches de prouesses lexicales aromatisées au parfum d’esperluette) on peut même reconnaître le tendre et dangereux visage de l’amour, et celui de la Barbara de cette Brest, dont il ne reste rien.
Du coup, avec le bienveillant sourire gouailleur de Prévert, on peut entendre, au loin c’est-à-dire tout près de notre oreille interne
Ce grand cet immense
silence des villes
sous la pluie
dont Francesco nous gratifie.
Tendons l’oreille : on y reconnaîtra la vie, la vie, telle qu’en poésie l’instant furtif la change.
— Gil Jouanard, extrait de la postface
Né en Sardaigne en 1956, Francesco Pittau a étudié la peinture, la gravure, et fréquenté des cours de journalisme. Il est l’auteur de romans et de recueils de poèmes, dont Épissures (L’Arbre à paroles), grand prix de poésie 2021 de l’Académie royale de langue et de littérature françaises. Il est aussi l’auteur ou l’illustrateur d’une centaine de livres pour la jeunesse, parus chez Gallimard, Albin Michel, au Seuil ou à L’École des loisirs.