• Auteur(s): Stefano Kaoze
  • Éditeur: M.E.O.
  • Péritexte: Édition critique sous la direction de Maurice Amuri et Jean-Claude Kangomba
  • Format: 14.8 x 21 cm
  • Nombre de pages: 512 pages
  • ISBN: 978-2-87168-086-4
  • Parution: 2018
  • Prix: 25 €
  • Disponibilité: Disponible
  • Distribution: Pollen

La Psychologie des Bantu, publié en 1910, est le premier texte de la littérature congolaise de langue française. Il impose quelques solides remises en perspective sur l’histoire des francophonies littéraires africaines, comme sur la précocité et l’intelligence des réactions congolaises aux savoirs apportés par le colonisateur.
Stefano Kaoze y explique à ses interlocuteurs occidentaux l’autre forme de culture qu’est celle de ses ancêtres. Il indique ainsi les chemins de l’inculturation en lieu et place de l’acculturation.
Tout au long de son existence, à côté de ses tâches pastorales, cette figure subtile et tenace de prêtre et d’intellectuel poursuivit discrètement ce travail en faisant passer en français la mémoire des Batabwa. Il donnait ainsi des assises à la connaissance interculturelle comme à la conscience identitaire des siens.
Le rassemblement et l’édition critique de ses textes constitueront une découverte pour beaucoup. Elle pose une balise majeure pour la prise de conscience et l’étude de la littérature francophone congolaise.

Édition critique sous la direction de Maurice Amuri, professeur à l’université de Lubumbashi, et Jean-Claude Kangomba, chargé de recherches aux Archives et Musée de la littérature.
En coédition avec les AML.

Extrait
Le Jugement
Un homme qui juge bien c’est le « muntu wa mulangwe ». Ainsi un enfant a été blessé par un autre. Mais c’est le blessé qui a provoqué la bataille. Le père ou la mère du blessé vient demander : « pourquoi mon enfant a-t-il été blessé ? »
Cette question indique, d’après nous noirs, que ce père ou cette mère a un bon jugement ; il n’est pas faux ; car s’il était faux, il ne viendrait que pour se venger. Suivons notre exemple. Si ceux qui assistaient à la bataille lui répondent que c’est son enfant qui est la cause de la bataille et si le père ou la mère accepte ce témoignage après une réflexion ou raisonnement de se dire : « Ah ! c’est vrai, ces hommes ne me trompent pas à cause de ceci ou de cela » et ajouter à haute voix : « Ah, mon enfant, c’est ta faute, tu as mérité ». Ah ! cet homme juge très bien, il ne suit pas ses propres sentiments, dirons-nous.
Le bon jugement est très respecté ici chez nous. Aussi ce n’est que ceux qui jugent bien qui sont intelligents dans le pays. Cet art se remarque surtout dans les enquêtes à arranger dans le pays ; il y a des individus, connus pour cela. Ce jugement est pratique, est surtout dans le côté moral. Dans ce point le jugement est surtout donné aux hommes à l’âge mûr.
Le Raisonnement
[…] Pour tromper quelqu’un dans les enquêtes, nous ne sommes pas malins, comme a dit M. A. Hoornaert ; nous ne voyons pas les détails que le juge va nous imposer â répondre. Même un noir plus malin, par exception, pourrait les surprendre en faute. Tout cela parce que le raisonnement n’est pas clair. Nous voulons dire beaucoup pour tromper le juge, mais nous nous tendons les pièges dans lesquels nous serons pris. Surtout dans l’état de sauvagerie. Le civilisé, sans égards à la Religion est surtout menteur.
Souvent nous ne savons pas même ce que le Blanc veut de nous et comment raisonner avec lui et nous tremblons devant lui.