
Yzant, ex-sauveteur en mer et veuf, tente de survivre depuis un drame dont il porte la culpabilité. La rénovation d’un camping, une vie simple et tranquille en pleine nature lui tiennent lieu de bonheur. L’apparition d’Amaïkha, une femme mystérieuse qui arpente la plage vêtue de rouge vif aux mêmes heures que lui et le retour inattendu de Teho, neveu et presque fils adoptif avec lequel Yzant s’est brouillé, vont fragiliser ce précaire équilibre. Le jeune homme est accompagné de son ami Romain, un urbain idéaliste, vif d’esprit et amoureux compulsif. Teho noie dans la pratique frénétique du surf une colère sourde contre son oncle, Romain tente à sa façon de les aider à percer l’abcès. Entre eux, Amaïkha, miroir révélateur et incitation à la renaissance, une femme secrète aux multiples visages, qui les fascine tous trois.
Dans Partir, Marie Dô déroule avec poésie, humour et tact l’écheveau de nos existences fragiles face à la puissance des éléments. Au gré du flux et du reflux de nos paradoxes et de nos fêlures – comme un océan qu’il faut laisser partir puis revenir sans jamais lui résister –, une quête d’humanité, de son mystère, de sa beauté.
Extrait
Il la voyait depuis plusieurs matins, marchant seule sur la grève à la même heure que lui, le visage obstinément tourné vers l’horizon. Brune, toute en jambes et en cheveux, vêtue du même pull qui lui descendait sous les fesses, d’un rouge vif incongru dans ce camaïeu que les habitants du coin se plaisaient à reproduire jusque sur leurs vêtements ; aux couleurs de ciel, de sable, de mer, délavées, pour mieux se fondre dans le paysage.
Ce rouge strident, qui tranchait avec l’ocre et le fauve de la plage, prenait le pas sur tout le reste. Cette femme s’imposait à peine les brumes de l’aube dissipées, d’une liberté indécente.
Il lui inventa des larmes cachées, ses propres épines dans le cœur, un si grand naufrage qu’elle ne saurait plus nager en eaux amoureuses. Il la drapa de la nudité fragile des paumées, de la duplicité des allumeuses, ouvertes et disponibles à tout ce qui vient et passe, la couronna de l’insolence des prétentieuses qui se pavanent la tête haute et rien dedans. Encore une qui finira sans personne pour la pleurer.
Il remonta la dune, honteux de son aigreur envers une inconnue.