Féministe dans l’âme et féminité ancrée dans le corps, dans le coeur, Derèse scrute les divers visages de la femme marquée. Au fer rouge de l’errance, des danses cathartiques, libératoires, la femme qu’elle nous montre, et que les illustrations d’une autre femme cernent de couleurs et de sang, d’odeurs de fêtes, renoue avec le perdu, avec le nomade disparu .La métaphore, l’amour colorent avec tendresse ces portraits pourtant si cruels, si nets dans le manque, l’oubli, la faiblesse, voire la torture .Des images d’eau, de « perles d’eau », de miroirs, d’esprit « mouillé de pluie », de « nuits/ pour aimer et mourir », déposent les balises d’un univers décrit avec acuïté, sans aucune complaisance. S’il faut nommer la blessure, s’il faut désigner le « sang » du « sol rouge », s’il faut encore noircir les regards, une juste mesure rééquilibre les images.Comme chez d’autres poètes, l’aiguisé du regard offre des images tranchantes, et nettes, cruelles, justes .Je pourrais multiplier aisément les exemples et je ne dirais encore rien de l’extrême composition qui sert les textes : chaque page offre deux mouvements. Le premier semble plus aisé à partager; le second, en grasses, s’aggrave ou se libère, mais toujours de manière plus cinglante, plus resserrée. Il faut, bien sûr, relire ces soixante textes, s’en imprégner et y déceler toutes les beautés entre soif et vertige.
Anne-Marie Derèse est née le 22 juillet 1938 à Franières, non loin de Namur. Bercée par la Sambre et la Meuse, elle est venue à la poésie dès l’enfance, par le bonheur de dire la poésie et de la jouer. De nombreuses fois primée, elle est l’auteure d’une douzaine de recueils. Poète des laits et des blessures, elle poursuit son chemin au parfum des épines.