• Sous-titre: (un cahier d'écolier) Poèmes visuels aux longs prolongements
  • Auteur(s): Pierre Garnier
  • Éditeur: L'Herbe qui tremble
  • Genre: Poésie
  • Péritexte: Préface de Jean Miniac
  • Format: 21 x 21 cm
  • Nombre de pages: 348 pages
  • ISBN: 978-2-918220-25-1
  • Parution: 2015
  • Prix: 28 €
  • Disponibilité: Disponible
  • Distribution: Autodistribué.

Le Sable doux est l’ultime livre publié que Pierre Garnier ait conçu de son vivant : il est composé de quatre suites inédites dont une linéaire, « Notes sur la mer », et il se termine avec « les Poèmes de Saisseval » qui ont fait par le passé l’objet de plusieurs éditions indépendantes sous forme de recueil bilingue (en allemand, en anglais et en espagnol) avant de paraître en 2005 chez La Vague verte en édition exclusivement française. […]

Le Sable doux est un livre de célébration du monde et le nano-poème de la page 168 (« le cahier les rayons du soleil ») répond aux considérations linéaires des « Poèmes de Saisseval ». Cette approche éminemment dialectique du réel éclaire singulièrement et le recueil proprement spatialiste et les promenades sur le territoire de Saisseval de Pierre Garnier à l’origine de sa vision du monde. D’ailleurs, la coquille de l’escargot tient une grande place dans le Sable doux, une suite intitulée « Une œuvre de la mer » lui est à demi réservée puisqu’elle regroupe des variations sur ce schéma alors qu’on trouve dans le tome 2 d’Une mort toujours enceinte (publié en 1995) ces vers : « la Bible est un petit livre / mais l’escargot est encore plus petit / qui porte le monde depuis le début ». Il n’est pas interdit de penser (au risque de se tromper !) que c’est au cours de ses promenades à Saisseval que Pierre Garnier a été fasciné par des fossiles de gastéropode, voire en contemplant les murs de sa demeure construite en craie (l’ancien presbytère). Mais il y a mieux ; sont présents dans « Les Poèmes de Saisseval » les chevaux, les poissons (parfois nommés), les figures géométriques, le pain (avec sa croûte et sa mie), les arbres très nombreux et l’escargot qui donne lieu à des considérations très cosmologiques : « l’escargot est mon animal-totem : / cette colonne enroulée autour d’un point / est aussi le monde ». Tous ces éléments se retrouvent dans les poèmes spatialistes… C’est la carte du monde que dessine Pierre, celle qui est « la vraie carte de la terre ».

C’est ainsi qu’apparaît cette forme stylistique très présente dans la poésie de Pierre Garnier : le ressassement en tant qu’examen continuel des éléments du réel. Le ressassement revêt différentes formes. Il y a bien sûr ce va-et-vient entre la poésie linéaire et la spatialiste tel que les quelques lignes précédentes comparant « les Poèmes de Saisseval » et le reste du Sable doux le laisse apparaître. Mais si on recense les dessins utilisés, on remarquera qu’ils sont déjà présents dans les précédents recueils de poésie spatiale ; c’est le cas avec le A & O, avec les chiffres, l’accolade, l’escargot, le ⋈, etc… On ne reviendra pas sur l’escargot mais on signalera, pour le chiffre 2, que la suite initiale, « le Merveilleux Début », est composée exclusivement de ce chiffre mais qu’on compte 41 légendes différentes ! Et qu’en 1988 paraissait aux éditions Quaternaire un recueil intitulé Poèmes en chiffres… L’oncle-boulanger (le pain, la croûte et la mie, comme il est dit dans « Les Poèmes de Saisseval ») avec quelques variantes, légende plusieurs pictogrammes comme le A & O, les trois ➞, les chiffres 2 et 9, le poisson…). De même, la vierge enceinte (avec quelques éventuelles variations) légende aussi bien l’escargot ou le A & O. Par exemple… Et je n’aurai rien dit du cercle si présent dans le Sable doux, le cercle auquel Pierre a consacré un livre, les Chants du cercle, une épopée (Aisthesis Vergag, 2011)… Et je n’aurai rien dit non plus de la fraîcheur du Sable doux : l’écriture est parfois comme tremblée, on y sent la vie, l’exacte réplique de l’universalité traduite par la figure géométrique ou le pictogramme. Car le ressassement est l’émotion toujours répétée devant les manifestations de la vie, une ouverture sur l’infini. Le Sable doux  n’est-il pas sous-titré « (un caher d’écolier) poèmes visuels aux longs prolongements » ? […]

Lucien Wasselin, Texture.