Stèles est un des quelques recueils laissés inédits par François Jacqmin.
Datant du milieu des années 1980, il est l’aboutissement d’un processus d’écriture qui plonge ses racines dans la réflexion et le travail que le poète a longtemps consacrés à la question de l’Être. La récurrence des thèmes obsessionnels de Jacqmin — l’être, le néant, la vérité, le verbe, l’évidence, l’unité, l’existence, la logique ou la pensée — montre une tension avec la démarche philosophique qui relève surtout d’une défiance à l’égard de toute démarche intellectuelle. Chaque poème est une énigme, une impasse, une nécessité qui ne dissimule que partiellement la douleur de l’homme et sa présence intime, mais qui redit la tâche fondamentale du poète : se rendre solidaire de l’univers en prolongeant sa beauté.
Dans Stèles, la nature aphoristique du poème chez François Jacqmin atteint une limite rarement dépassée : chaque texte s’ouvre sur un abîme d’évidence.
L’importance de l’œuvre poétique de François Jacqmin n’a cessé de se confirmer depuis sa mort survenue il y a vingt ans, en 1992. Né en 1929, Jacqmin quitte en 1940 la Belgique avec ses parents pour gagner l’Angleterre, où il vivra jusqu’en 1949. Ce séjour marquant décidera de son intérêt pour la littérature anglaise ; c’est d’ailleurs en anglais qu’il écrira ses premiers poèmes. De retour en Belgique, il fréquente l’équipe de Phantomas (Joseph Noiret, Marcel Havrenne, les frères Piqueray, Théodore Kœnig, Paul Bourgoignie et Pierre Puttemans).
Poète exigeant, Jacqmin se décidera tardivement, passé la cinquantaine, à publier et ne fera paraître que quelques brefs recueils de son vivant, en accordant un soin extrême au choix de ses textes lors de la préparation de leur édition. Trois livres se détachent nettement de son œuvre : les Saisons, le Domino gris et le Livre de la neige. À sa mort, il laisse de nombreux inédits dont plusieurs ont été publiés depuis, notamment chez Tétras Lyre, au Taillis-Pré et aux éditions de La Différence.